[Enfants de l'Apocalypse] Introduction

Edhana regarda les gens s'affairer, visiblement ils allaient bientôt partir ... elle ne savait même pas si elle était de la partie ou bien si elle allait devoir attendre dans le camp.

"Oui, en fait ce que je te montre la, ce sont les majuscules, c'est à dire les lettres que nous utilisons en début de phrase ou encore pour les noms propres .. comme Edhana, Aelwyd..

Après tu as les minuscules... de cette forme la. Edhana se mit à les écrire dans la terre.

Tu as encore d'autres manières d'écrire avec des enluminures, mais personne n'attendra que tu saches les écrire... a moins que cela ne t'amuse un jour."

Elle regarda les hommes qui remplissaient leur sac.

"A mon avis vous partez bientôt..."

Devoir rester dans un bain de poison, sans aucune protection. Devoir marcher sur un fragile pont de corde, traversant le vide. Devoir porter une grenade dégoupillée, sans la jeter. Devoir escorter un elfe, jusqu'à Altdorf. Situations semblables, risques similaires, tensions identiques.

Une petite Meute de 30 Loups parcouraient le territoire, entourant un elfe affaibli et traqué. La Chasse avait duré des jours, s'étendant sur les innombrables lieues séparant Wolfensburg et la Grande Tanière de l'Empire. Mais pour une fois, les rôles étaient inversés. Les prédateurs avaient laissé des traces tout près du campement. Au nombre de trois, ils avaient eu tout le loisir de repérer la petite Meute qui avançait. Bien que le rythme fut soutenu, l'allure paraissait lente, et les distances si longues. A croire que les regards furtifs des Druuchi, l'impression perpétuelle d'être observé, pire, d'être dans une ligne de mire créait une distorsion dans le temps, filtrait les minces grains de sables qui tombaient du sablier, ralentissant leur chute.

La première frappe survint dans la région du Haut-Col. Déjà austère, l'endroit paraissait hanté pour la Meute. Sous chaque tas de neige, derrière chaque rocher, tapis derrière chaque corniche se trouvait un hypothétique assassin. Il fallait repérer tous ces fantômes, et scruter l'immensité neigeuse, percer les blocs de pierre du regard, distinguer des ombres parmi les ombres. Mais il n'y eu que des fantômes, précédés par des marques d'un rituel sur un arbre, comme un avertissement laissé consciemment par le chasseur pour rendre la proie hystérique, la faire paniquer pour faire céder la discipline de la Meute. Mais les Loups tinrent bon : quand l'embuscade se déclencha, ils étaient prêts.
Le calme avant la tempête. Ces quelques minutes où le vent s'arrête de souffler, où le soleil brille d'un éclat brillant, réconfortant par sa puissance, sa chaleur. Il ne peut rien vous arriver. Mais qu'est ce donc alors, que ces tremblement sous vos pieds? Les jambes fourmillent, dues à une marche forcée depuis trop longtemps? A la fraicheur de la neige qui parvint à pénétrer les chausses de qualité médiocre? Ou la tempête qui se déchaine, causée par l'ombre qui planaient depuis le début au dessus de vous, invisibles et intangibles, mais qui obscurcissaient le chemin sur lequel vous marchez?

Coups de tonnerre, paroles magiques déformées par le vent, éclairs de lumière ou lances de glace sortant du sol? Sur le coup, il était difficile de savoir, une chose était certaine: danger! Mues par des reflexes entrainés, une discipline martiale apprise ou un simple instinct de survie, les Loups essayèrent de quitter la cible sur laquelle ils se trouvaient. Les crocs de glace sortaient du sol, et certains s'enfoncèrent dans la chair des Loups. Deux perdirent la vie, d'autres furent blessés. Il ne faut jamais réveiller un ours qui dort. Que dire de l'agression d'une Meute de Loups nerveuse, et à présent enragée par le sang des leurs qui coulent dans la neige? L'origine du cyclone était repérée, là haut sur la corniche. Et le prédateur devint proie, comme le gibier devenait chasseur. Une flèche atteignit la sorcière Elfe Noire, semblant tracer un chemin que suivaient 3 Loups, servant de héraut à 3 porteurs de mort. Un coup de feu retentit, une stalactite tomba, une sorcière bascula dans le vide...enfin presque.

La main est un des organes les plus importants des humanoïdes. Elle peut sauver la vie, en s'agrippant à une corniche, empêchant une chute fatale, là bas, parmi les stalagmites de glaces et le sang des Loups. Elle peut serrer le manche d'un lourd marteau, et faire danser l'arme devant les yeux d'une sorcière, tentant de lâcher un dernier sortilège alors que la mort elle même se joint au ballet. Un impact, des os qui craquent, une chute, un empalement : la vie tient à si peu de choses. Tel est le destin des chasseurs qui pensent ajouter une fourrure de loup à leur collection.

Les Loups sans vie furent rapidement ensevelis : la Meute avant tout, même dans la mort ils participaient à la protéger par ce prix. La marche dans un couloir de mort reprenait. Le sang avait coulé, mais pas pour l'Elfe. Il était encore en vie. La mission devait continuer.

La neige qui tombait recouvrait déjà le sang, les corps, les traces de combat. Bientôt, il n'y eu plus de traces du conflit, sauf dans la mémoire de la Meute, qui continuait d'avancer en scrutant les alentours. Le paysage défilait, un col fut passé, un autre le remplaça. Et puis au fond d'une vallée surplombée par un pont naturel, une fine avancée de roche reliant les deux massifs entourant la route, un éclair apparu. Les Loups préfèrent chasser la nuit, la Lune étant la compagne des prédateurs. Le soleil ne l'est pas, et le Druuchi aurait du le savoir. La pointe de sa flèche l'a trahit. Alors que l'alerte fut donnée par la Meute, des incantations étaient déjà prononcées et des Loups quittèrent la Meute pour fondre sur le danger. Une louve prédit le poison recouvrant la flèche. Bon à savoir, mais si elle ne touchait pas sa cible tout irait bien. Des boucliers furent levés devant l'Elfe, certains physiques, faits de fer et d'acier, d'autres divins par la force de l'esprit. Ils furent efficaces, mais pas suffisamment : l'un des projectiles parvint à atteindre sa cible, à l'épaules.

Qui peut dire où est le chaos et où est la discipline. Vue de la haut, on voyait des Loups affairés autour de l'Elfe, le déplaçant, le soignant alors que d'autres gravitaient autour, cherchant à la protéger. Vue d'en bas, on voit des ombres danser sur la corniche sur le son d'une détonation et de chocs entre lames et armures. On pouvait croire au chaos parmi ces fourmis agglutinées autour de deux centres. Mais chacun avait un rôle à jouer, un endroit où se placer, une tache à effectuer.

L'échange fut bref sur la corniche, la fragile danse du druuchi s'écrasant sur un mur de fer avant de chuter jusqu'en bas, où une flèche fut retirée d'une épaule, et des soins magiques et traditionnels furent appliqués au blessé. Aucune victime parmi la Meute, mais l'Elfe était passé près de la mort.

Un faible soulagement accompagna la Meute lorsque le Talabecland fut atteint : la neige, le froid, le vent n'était plus. Mais le chaos avait remplacé tout cela, brulant un village sur la route. Quittant la route pour les marais, la Meute avait-elle gagnée au change? Les piqures de moustiques remplaçaient celles du froid, l'humidité n'était plus la conséquence de la neige mais de l'eau verdâtres qui les entouraient. Quelques gobelins furent repérés, mais leur gorges transpercées par des flèches ou leurs têtes découpées du reste du corps ne purent déclencher l'alerte.

Et enfin le Reikland, la proximité d'Altdorf, les épaisses et hautes murailles rassurante juste par leur présence. Le reste se déroula sans incidents, malgré une tension grandissant au même rythme que ces murs de pierre entourant la cité. Et enfin les portes, qui apparurent puis s'ouvrirent pour laisser passer la Meute, et son colis. Quelques rues traversées et l'Elfe arriva à destination.

Bilan de la chasse : 2 louveteaux morts, quelques blessés, et un contrat rempli. Le lendemain, un autre contrat le remplaçera peut-être....sûrement même. La Meute n'est jamais aussi vivante que lorsqu'elle danse avec la mort, lors de la Chasse.

Malgré la fatigue, le froid qui s’insinuait dans la tente parvenait à percer les couches de tissu empilées sur mon corps qui devaient m’en protéger, me plongeant dans un état de paralysie douloureuse. Le seul avantage de cette faible température, c’est qu’elle empêchait les effluves de bourbier ramenées du Talabecland de parvenir jusqu’à nos narines.

Nous étions une trentaine, peut-être plus, à être partis, presque à l’improviste. Une heure pour nous préparer à accomplir un voyage de quelques jours jusqu’à Altdorf, c’était bien peu. Surtout quand ce trajet ne s’effectuait pas dans le calme. Pour cette mission, j’étais chargée de protéger au plus près cet elfe tombé de nulle part dont on avait tant parlé dans le campement. C’est en voyant combien il était offusqué de devoir côtoyer une bande de mercenaires trop peu distingués à son goût que j’ai cru comprendre qu’on m’avait donné ce rôle pour qu’il soit le moins insupportable possible pendant le voyage. Pour ma part, je l’ai trouvé bien froid et bien ingrat vis-à-vis de nous, vis-à-vis de moi. Il avait déjà été sauvé d’une mort certaine par le convoi de ravitaillement, et nous venions d’assurer sa survie une seconde fois. Pourtant, il n’offrit en guise de remerciement aux jeunes loups qui l’avaient escorté que la vue de son dos lorsqu’il s’engouffra dans la maison qui lui servait de refuge.

Pour partir, il était monté dans un chariot avec un cocher et la Rêveuse. J’étais juste à côté mais l’écart de distance qui existait entre le piéton que j’étais et le passager me semblait gênant pour pouvoir faire mon travail correctement. Je fis avec, car ce détail n’aurait certainement pas été une excuse si les événements avaient vraiment mal tourné pour lui.

Sortir de l’Ostland fut l’une des parties les plus aisées. Ce bout de chemin me laissa le temps de me concentrer sur ma tâche. Je sentis que les bois autour de nous recelaient la présence de prédateurs qui semblaient suivre chacun de nos pas. Aucun d’entre eux ne se risqua à se montrer, encore moins à venir à découvert. Et pourtant je croyais que le terrain était propice à une embuscade bien que nous fassions preuve de vigilance après avoir ressenti leur présence. J’avais déjà assisté aux ravages que pouvait causer le passage d’une troupe de sang-froids menés par des maîtres non moins cruels, je savais qu’ils auraient pu nous anéantir. Peut-être que leur nombre était insuffisant. Ils disparurent quand nous commençâmes l’ascension des monts du Haut-Col, nous laissant tout le loisir de nous préoccuper d’autres dangers.

Ces jours passés sur les routes m’ont rappelé les deux années d’invasion elfes noires à Avelorn, dans un des cœurs de notre île. Même si vous saviez que vous pouviez compter sur les talents de vos compagnons d’armes, il était impossible de dormir sur ses deux oreilles. Il fallait que notre corps vienne nous ordonner de céder au sommeil pour qu’il soit peuplé d’autre chose que de cauchemars prêts à vous couper dans votre repos. Ce fut à peu près le même scénario. Pour avoir vu les Loups à l’œuvre, je savais que nous serions prévenus assez tôt de la venue d’un danger. Pourtant, le fait de ne pas savoir qui nous poursuivait, et surtout pourquoi des Druchii infiltrés dans les terres impériales voulaient à tout prix attenter à la vie d’Opollan, quitte à nous écraser au passage, me faisait redouter le pire.

En entrant dans les cols enneigés, un arbre dénudé saccagé à coups de dague nous arrêta. Il était porteur d’un message assez évocateur, une inscription en langage d’elfe corrompu qui disait très exactement sacrifié pour Khaine, sans préciser dans l’histoire si c’était l’arbre qu’on avait sacrifié ou si Opollan allait l’être. La réponse nous arriva après des heures à s’enfoncer dans la neige jusqu’à en avoir les bottes trempées. Les vents commencèrent à souffler, et à leurs cris se mêlaient des chants magiques dont je ne parvenais pas à comprendre le sens. Ces bruits sonnaient comme une litanie dans ma tête. Et quand la violence de ces chants sauvages fut à son zénith, le sol trembla sous nos pieds, la glace se craquela et le crissement de ces eaux solides qui se brisaient fut l’annonciateur du sort néfaste qui voulait s’abattre sur nous. Des pics de glace jaillirent sans que nous puissions prévoir où ils allaient éclore. Une stalagmite poussa en grinçant devant moi, elle me sonna en percutant le bouclier qui constituait un obstacle à sa croissance. Le sort continua d’agir un moment et s’interrompit soudainement. J’étais toujours à côté d’Opollan et je n’aperçus que de loin le massacre de la sorcière qui avait voulu en attenter à notre vie. On s’occupa des morts et des blessés puis le convoi reparti, toujours à l’affût d’un autre traquenard.

Notre deuxième rencontre avec un elfe noir fut plus dangereuse pour le protégé que pour ses protecteurs. Cette fois, un arbalétrier avait profité de l’existence d’un pont de pierre qui surplombait la route pour s’amuser à essayer de tuer d’un carreau l’Asur. Ce dernier s’en sortit avec un dard dans l’épaule qu’on lui retira le temps que le Capitaine et une poignée d’hommes se charge de mettre fin aux jours du Druchii. Mes réflexes n’avaient pas été à la hauteur de la vitesse du projectile, mon bouclier n’avait pu s’interposer qu’entre l’air et l’elfe.

Notre périple se poursuivit sans que nous devions faire face à d’autres dangers du même genre. Le froid mordant fit place à l’atmosphère humide des bois et marécages du Talabecland. Nous suivions le chemin jusqu’à en arriver aux ruines calcinées d’un village impérial. Le Capitaine, ne voulant pas se mesurer de face et en nombre aussi restreint à la férocité des pillards nordiques nous mena dans une autre direction, jusque dans les marais infestés de moustiques autant que de gobelins, heureusement pour nous les peaux-vertes étaient plus désorganisés et moins vifs que ce que peuvent l’être des nordiques. C’est de ce passage que nous tirons l’odeur infâme qui nous accompagnera tant que nous n’aurons pas eu le loisir de lessiver nos vêtements. Tout était croupi, pourri, et même les passages les plus au sec offraient à nos semelles son lot de bouillie faite d’eau stagnante et de corps végétaux et animaux en décomposition. Ce fut notre dernière véritable épreuve avant de devoir passager les divers barrages gardés, et surtout avant notre arrivée à Altdorf. Une fois là-bas nous je pus rentrer mon arme dans son fourreau, ne tenant plus que mon bouclier. Opollan partir comme il était arrivé. En un éclair, sa présence devint absence. Les gradés durent s’entretenir avec lui avant que nous ne partions monter des tentes pour la nuit, avant le voyage de retour. Et je crois que je pourrai attendre une éternité avant que le moindre remerciement de la part d’Opollan ne nous parvienne. Lui qui m’avait appelé ma sœur au départ, je crois que c’est là bien plus une habitude de langage qu’un témoignage des liens profonds qui unissent les membres d’un même peuple. La fraternité n’existe pas que par le sang.

Le soleil n’allait pas tarder à se lever sur le campement des Loups d’Ostland. Ses rayons, lances de feu affaiblissant peu à peu les défenses de la voute nocturne, commençaient à percer l’horizon, combat coutumier entre deux forces opposées et pourtant indissociables.


L’une pouvait elle exister sans l’autre ? La nuit aurait elle le même sens pour nous si le jour n’était rien, et inversement ?


Et ces couleurs que projetaient l’aurore, ces pastels écarlate, cinabre et aniline s’étalant les uns les autres de plus en plus, se mélangeant dans un tourbillon rouge vif tandis que le disque d’or gagnait du terrain, n’était ce pas là un signe d’Inalaa, déesse de la sagesse, prévenant ses enfants que la journée qui les attendait était marquée par la tragédie au fer rouge du sang ?


Toutes ces idées, et bien plus encore, fusèrent, emplissant l’esprit d’Opollan Brume de feu, messager des Guetteurs, tandis qu’il suivait au pas le Capitaine Malheur vers le contingent qu’il lui avait alloué pour son escorte.





Alors que le ciel explosait de milles feu face à l’incursion d’un astre solaire émergeant de derrière les montagnes, pourpre et feu se déversèrent du ciel illuminé sur l’armée présente, sur ces 30 hommes, ces 30 chiens de guerre, arrosant d’un éclat de sang armes, armures et regard d’acier.


Indomptable…Sanguinaire…Opollan se rendit alors compte que le carnassier qui flottait sur l’étendard brandit bien haut par l’un des sergents n’était pas qu’une veine image, un simple blason cousu sur le tissu.


Et, avant que le soleil ne soit totalement sorti de sa couche, le convoi se mit en branle, le voyage commença.


Quelques heures à peine après le départ, alors que la monotonie prenait peu à peu place, alors que la route en devenait une simple ligne continue et que l’horizon un point inaccessible, point de mire des voyageurs, la concentration s’amenuisait.


Par chance quelques esprits étaient encore vifs, suffisamment du moins pour percevoir les ombres danser dans les sous bois, suffisamment pour entrevoir l’origine de ces mouvements, suffisamment…Espérons le…





L’alerte fut donné et la compagnie adopta rapidement une formation défensive, mur de bouclier et attention accrue, démontrant que la léthargie qui semblait les gagner n’était qu’une façade, la somnolence d’un loup n’empêchant pas ses oreilles de se dresser quand vient le danger. Tandis que le sergent de la voie de la Meute, « l’adoubé », partit en reconnaissance, furtif, ombre parmi les ombres, le soleil joua le jeu des assaillant, se voilant à son tour derrière le feuillage brumeux des nuages.


La tension était pesante, écrasante, s’appuyant sur les épaules de toute sa masse tandis que tous attendait le retour du sergent. De longues minutes s’écoulèrent ainsi, minutes comme ralenties par une main divine, serrant le poing afin de freiner la chute du sable du temps, l’empêchant de s’écouler entre ses doigts et prendre plaisir, ainsi, à la déroute des hommes…





Enfin, « l’adoubé » réapparut et sa découverte fut sans appel : Ils étaient là !!! Eux, sombres cousins voués au Dieu du Meurtre, traqueurs coriaces comptant bien finir ce qu’ils avaient commencé, ils étaient là !!


C’est donc sous le poids de cette menace que le convoi reprit son avance, les roues reprenant leur rotation tandis que le soleil, lui, continuait sa révolution, inlassablement.


Le paysage boisé de l’Ostland céda peu à peu la place aux montagnes abruptes du Haut Col, le vent, jusqu’alors léger et agréable, devint bise froide, souffle gelé, interminable soupir glacial soulevant cape et manteau et obligeant les loups à resserrer le pan de leurs vêtements. La marche en devint plus pénible, plus dure mais la meute n’en démordit pas et continua son avancée, tête baisse et oreilles hautes, à l’affut, toujours…




« Le Ruminant » et « le Larmoyant », en tête, ouvraient la marche, telle la proue d’un navire affrontant l’écume des vagues en premier, fendant les murs d’eau iodé sans ciller, se mettant au devant du danger, toujours….


« La Goupille », « le Culotté », « Trois carrés » et « le Guignard », avec l’entêtement typique de ceux de leur race, s’obstinaient sur les flans de la troupe, cherchant des yeux le moindre indice sur leurs ennemis, ces vils couards préférant les embuscades au combat de plaines, alors que eux, nains, jeunes loups mais déjà hargneux, le poil hérissé et les dents affutées, ne lâchèrent rien, se cramponnant aux manches de leurs armes comme à leur fierté, allant de l’avant malgré le climat, toujours….


« L’Orgueilleuse », détachée à la protection d’Opollan Brume de feu, ne faillit pas à son devoir, malgré les flocons de neige, malgré les cristaux d’hiver, cinglant le visage, brulant les yeux quand ils étaient associés à la violence des rafales, toujours resta t’elle à ses côtés, bouclier levé, solidement harnaché sur son avant bras, toujours…


« La Rêveuse », prêtresse de Lilaeth, scrutait les environs, cherchant dans les lignes telluriques la moindre perturbation, la moindre variation pouvant entrainer un déluge de feu même dans ces montagnes gelées, attentive, toujours…


« La Torche », louve au tempérament de feu, ressentant la magie plus que l’étudiant, maintenait sa concentration suivant l’escorte tout comme les ordres, ne la laissant à aucun moment, qu’importe la violence du vent ou la morsure du froid, bouche de l’hiver aux dents givrées, concentrée, quoi qu’il arrive…Toujours…


« L’Illuminé » et « l’Adoubé », sergents respectifs de la voie du Sang et de la meute, piliers de la troupe, maintenaient le rythme autant que l’attention de leurs hommes, à l’affût tant de l’environnement extérieur que du moindre relâchement dans les rangs, toujours…


Et Malheur, capitaine de cette compagnie franche, loup à la robe de feu, au regard de braise et au nerf d’acier, ne courbant l’échine ni devant le danger ni devant la rudesse du climat des Hauts Cols, continuant à avancer, la tête haute, une main sur le pommeau de son arme, toujours…


Et l'ennemi tout comme le soleil, scrutant les voyageurs de leur hauteur, était là,....Toujours....


Suite du texte prochainement...

Tandis que la traversée de ce désert argent continua, le ciel se voila, linceul enrobant la région de sa toile mortuaire comme pour annoncer la venue de son émissaire, la mort ayant cette faculté à se faire convive de chaque repas, à se faire passager de chaque voyage quitte à ce que les autres en paye le prix. Le soleil, disque pale dans cette mer blanchâtre, devint discret tandis que le blizzard, haleine glacial de l’hiver, fit son apparition.


Un chant arriva alors aux oreilles des plus attentifs, litanie accompagnant les soupirs du vent, l’épousant jusqu’à faire sienne le mistral, jusqu’à ne faire qu’un, unit pour le pire….Le pire…


Les lignes telluriques s’agitèrent violemment tandis que le sol se mit à gronder, telle une bête annonçant sa riposte, prête à mordre la main tendue vers elle. Ses crocs étaient de givre, sa bave était glaciale et l’avertissement sonore, ce grognement bestial, devint cri de rage quand la magie implosa, déchirant le linceul pour faire apparaitre le visage de la faucheuse.


Des piques de glace sortirent du sol, véritables pieux effilés jaillissant de nulle part, la terre tremblait de plus belle comme contrariée par le passage des loups, refusant de tout son être leur venue et secouant sa masse pour chasser la meute de parasites.


Les ordres fusèrent aux rythmes des stalagmites assassins mais il fallait plusieurs minutes aux Loups pour s’organiser devant cette attaque d’en dessous. Deux recrues en firent les frais : « L’aigreffin » fut littéralement transpercé de part en part, figé debout malgré la vie qui lui échappait alors que son camarade « le Timoré », son frère de sang, mot d’un coup prenant tout son sens, se retrouva renversé par un premier pilum, évité de justesse, avant qu’un autre, lui perça l’abdomen tandis qu’il tentait de se relever. D’autres encore furent blessés notamment « l’Adoubé », sergent de la meute qui, contraint d’éviter une de ces lances d’eau givrée, fit un roulé boulé, évitant ainsi la mort mais pas suffisamment pour que la faux de la camarde lui déchire la cuisse. La perfide fossoyeuse au crane poli tenta même dans un élan de confiance peut être ou en signe d’appétit gargantuesque de prendre dans sa besace le Capitaine en personne qui, désarçonné par l’hast de cristal, exécuta une remise sur pied rapide et salvatrice.


Et enfin, enfin la source de cette embuscade fut découverte là haut, sur les hauteurs, les mains levées pour canaliser les vents telluriques, sa voix s’élevant encore et encore, montant crescedo au fil de la durée du sort, une elfe noire incantait. Sa puissance était à la mesure de sa beauté, froide et calculatrice, et aurait pu monter encore si une poignée de téméraires, sans doute guidé par le sang, cet appel inconscient animant tout loup, ce goût métallique vous emplissant les papilles d’une excitation animale.


Trois, ils étaient trois… Plus que le nombre de secondes que la sorcière mit à chuter, s’écrasant sur le sol, plus qu’il n’en fallait pour stopper l’attaque…Trois, trois comme le nombre d’âmes emportées par la faucheuse ce jour là…


-Suite et fin du texte rapidement-

La nuit ne fut guère réparatrice et c’est bien avant l’aube que la troupe reprit son chemin, l’enfer neigeux semblant presque scintiller en cette heure matinale.


Quand le soleil apparut enfin, deux, trois heures après leur départ, il réchauffa un moment le corps et l’esprit de ces êtres errants, de ces vagabonds des routes. La douce chaleur s’étendant sur la région aurait presque pu faire oublier la tragédie de la veille, la chasser d’un revers de main comme l’on chasse un insecte nuisible mais les parasites à la poursuite d’Opollan étaient tenaces et il ne tarda guère à ce que, de nouveau, l’un d’eux viennent perturber l’avancée.


La haut, à plusieurs mètres au dessus du convoi, d’une position idéale pour ce tueur embusqué, l’elfe noire prit le temps qu’il lui fallait pour viser, trop peut être car les loups ont un flair affuté, un odorat profond capable de sentir la venue de la mort avant même qu’elle ne passe le pan de la porte.





Aussi, lorsque, telle la guêpe piquant de son dard empoisonnée la main hasardeuse, le carreau fila vers sa cible, vers le cœur de l’Haut elfe, déjà fusèrent de part et d’autres ordres, sorts de protection et position défensive.


Mais l’assassin insista, encore et encore jusqu’à ce qu’un seul de ces traits ne franchisse les barrières magiques, jusqu’à ce qu’un seul de ces tirs touche au but, jusqu’à ce que son aiguillon perfide frappe Opollan de plein fouet.


Tout aurait pu se finir là, tout…


Mais quand vous avez la faucheuse pour conjointe, quand elle fait partie de votre quotidien, de votre vie, quand elle est votre amante, votre amie, votre parente, vous savez comment réagir à sa venue et la réaction des loups fut rapide et violente, comme toujours…


Tandis que les soins arrivèrent, un détachement, déjà, arpentaient les parois glissantes du haut col à la recherche de l’elfe, déjà montait il la pente escarpée en direction de la corniche, déjà les lames crissèrent des fourreaux, bruit de gorge des loups prêt à fondre sur l’ennemi.





La meute s’abattit sur lui sans retenue, comme pour se purger de la tension des derniers jours, en l’hommage des recrues mortes ou par simple envie de sang, peu importe, à dire vrai, peu importe pour le Druchii, le résultat fut le même.


Le soleil était à son zénith quand le convoi reprit son avance, comme pour être aux premières loges pour les voir quitter le haut col pour le Talablecland, lui, dans sa tour de feu, dans son phare crépitant de lumière et de chaleur et eux, simples mortels. Et comme pour témoigner de son admiration, peut être, leur accorda t’il un peu de réconfort avant de se nicher dans le creux des nuages, peut être… A moins que ces nuages ne soient fumés, que cette odeur d’humus ne soit en faite celle de corps en décomposition, à moins que l’astre solaire ne se gausse de leur entêtement et s’amuse à leur montrer ce qui les attend au loin.


Un village en feu, des nordiques par dizaine et la mort encore et toujours à leur trousse.


La décision du Capitaine fut sans appel, la troupe bifurqua, laissant le village à son sort, et s’enlisa un moment dans les marais. La traversée ne gagna guère en confort mais, contrairement aux apparences octroya un moment de répit aux Loups.


En effet, les quelques peaux vertes croisées sur le chemin boueux, rencontrés au détour de quelques ilots de terres mouvantes cerclées d’eaux croupis, les imperfections de terrain qui faillirent rompre plus d’une fois les essieux du chariot, rien, tout cela n’était rien face à ce qui les attendait si le capitaine avait ordonné de rester sur la voie pavée, s’il avait décidé de contourner le village mais de rejoindre ensuite la route, tout cela n’était rien face au dernier assassin.


C’est peut être de lui finalement que le soleil se moque, lui, tueur voyant au loin sa cible lui échapper pour avoir cru à l’imbécilité de ses ennemis, lui qui se retrouve à plusieurs lieux du convoi et ne peut qu’observer, la haine illuminant ses iris, Opollan Brume de feu franchir le poste de garde du Reikland, mettant un terme à la poursuite meurtrière, lui ombre parmi les ombres, contraint de retourner bredouille voir son chef.


Opollan, lui, reprit connaissance quelques lieux avant d’arriver à Altdorf mais, en un regard vers les cieux, il sut que les Dieux avaient veillé sur lui et les remerciait secrètement d’avoir mis sur sa route les Loups d’Ostland.



-Fin de l'introduction-