Fatigué

Le dé roula… « 4 »


« Héhé !! »


Vainqueur de cette manche, « l’Ecervelé » attrapa les pièces alignées sur le comptoir, enjoué par cette victoire et surtout par le pécule amassé.


« Jubiles pas trop !! J’ai la chance à porter d’noeud et j’ai encore assez d’jus dans les reins pour aller m’la chopper!! » Grogna le Boiteux portant sa choppe aux lèvres, voyant une partie de sa solde s’évaporer tandis que la porte de la taverne s’ouvrit sur l’inconnu.


La partie reprit, les mises fusèrent…Et la chance ne vint guère.


Premier jet de dés du Boiteux et déjà, il la perdit.


« 1 ». « 9 ». « 9 ». « 9 »… « La comète de Sigmar », combinaison éliminatoire en début de jeu.


« Oho !!, A moi les clinquantes, camarade !! » S’extasia le loup avant de reprendre à l’intention du lieutenant du Hurlement : « Elle est où ta chance déjà l’Boiteux ? »


« Un verre d’eau chaude, tavernier !! »


« T’marres pas trop, toi !! Dernière fois qu’une double queue m’bousille le jeu…Contrairement à ta régulière, hein, l’écervelé !! Quant à cette putain d’chance,…Bah, a croire qu’c’est une saloperie d’simulatrice !! » Lâcha le Boiteux, mauvais joueur, en tournant le dos au comptoir, et à la table de jeu par la même occasion, posant sur l’ensemble de la taverne un regard circulaire.


La compagnie s’était approprié la taverne il y avait peu de temps, depuis le grand déménagement de ces dernières semaines en faite, mais le Boiteux connaissait déjà de vue la majorité des habitués.


Aussi, d’un coup d’œil il se rendit compte que l’individu qui avait commandé de l’eau chaude était nouveau.


Pas trop dur à deviner du fait du lourd marteau encrouté de sang séché…Il était évident que ce n’était pas un paysan du coin, pas d’insigne d’armée impériale non plus, quant à être un loup…Aucune chance, le lieutenant connaissait les effectifs.


C’est donc avec une certaine attention qu’il regardait l’humain, « l’écervelé », lui, continuait à palabrer comme un coq sur sa victoire « haut la main ».

Quelques minutes s’écoulèrent ainsi, « le Boiteux » fixant l’inconnu tandis que ce dernier préparait sa décoction.


« On en r’fait une, l’boiteux ? »


Sans prendre la peine de regarder le loup, le lieutenant lui répondit:
« Aut’chose à foutre, aujourd’hui, qu’à r’enflouer ta bourse!! » Lacha t’il tout en quittant sa place, se dirigeant alors, de cette demarche chaloupée rythmée au cliquetis métallique de sa prothèse, vers la table du nouvel arrivant.


« Vu ta dégaine, tu dois r’vnir du front, non ? A moins qu’t’ais tabassé à coup d’marteau la gueule d’ta régulière avant de v’nir siroter ta flotte à gazon… » Commença t’il à l’intention de Wisphill Cain en désignant son arme posée sur le sol « …Alors, j’vais pas t’gonfler avec les nouvelles, j’dirai même qu’je m’en cognes les balloches mais faut bien s’tenir au courant…Histoire d’voir si les affaires sont fleurissantes pour nous !! » Finit il en s’asseyant en face de l’étranger, choppe en main.

Wisphill avait son sourire narquois vissé sur le visage finissant tranquillement son thé en voyant l'homme patibulaire lui adresser la parole. Finissant son bol il le posa sur la table.

-A vrai dire elle ne sont pas très bonne. Les forces de la ruines dominent une large partie des territoires de notre alliance, même si nous leurs somme bien supérieur en plaine. Il se contente de raid furtif et prennent positions dans des citadelles abandonnées ou gardées par une petite garnison, avant de s'enfuir à notre approche. Le gros des troupes ne fait que vagabonder entre les fronts à un ennemis qui se dérobe. Rien de bien exaltant en soi. Surement la résultante du peu de fiabilité de nos généraux. L'hiver s'intensifie, je me demande combien de temps les troupes pourront encore tenir. Surtout ceux qui ne font pas partie de l'armée régulière.

Wisphill tira une longue bouffée sur sa pipe et regarde handicapé dans les yeux.

Sans demander permission, le lieutenant prit place sur la chaise en face du guerrier

"Bah, les Loups n'sont pas de l'armée régulière comme tu dis mais t'inquiètes pas pour nous, on a plus d'jus dans l'chibre qu'un moine gardant jalousement sa sainte semence pour une pauv'parole donnée. A la différence, on tire à vue en s'foutant d'saloper les draps alentours!!" commençant il en sirotant une longue lampée avant de reprendre : " Quant à la mobilisation et aux passifs des généraux, les tocards s'planquant derrière un titre affublant un égo aussi démesuré qu'mon soldat au garde à vous au réveil, ils m'foutent la gerbe. Ca s'la raconte comme s'ils avaient des pastèques dans l'slibard mais au bout du compte, ils mettent des plombes à trouver leurs raisins secs dans leur couche. On d'vrait les mettre sur l'front avec leurs hommes, ils s'bougeraient plus les miches au lieu d's'contenter de lire leur carte d'état major déplaçant les unités comme d'vulgaires pions sur un plateau d'échec!! Voilà mon avis!!!"

Vide….Sa choppe était vide et sa vessie pas encore pleine, il fallait y remédier. Posant le verre d’étain sur la table, il se contenta de lever le bras à l’attention du tavernier, lui faisant remarquer qu’il avait soif.


Alors que ce dernier s’approcha, une nouvelle timbale de bière en main, le Boiteux reprit sa conversation avec l’humain au marteau, occupé qu’il était à dévoré ses gâteaux.


« Marrant ça, d’parler d’famine en becquetant des sablés !! Comme si j’te parlais d’abstinences, une main dans l’décolleté d’une coureuse d’rempart !!... Bref… J’sais pas qui t’es, mon gars, mais moi, j’suis un Loup d’Ostland et s’ il y a bien un truc inaltérable dans c’monde, c’est qu’la Compagnie finit toujours ces contrats. Alors, oui, on s’fait payer pour faire la guerre. Perso, j’trouve ça plus honnête qu’d’aller sur l’champ d’bataille pour l’honneur, pour l’cul d’un Général qui s’en bat les miches du sort d’ses hommes ou pour la sainte semence giclant divinement du ciel qu’certains prêtres s’obstinent à faire croire aux crédules. La monnaie, la clinquante, trébuchante et sonnante, c’est peut être qu’c’qui nous motive mais au moins, on met un prix sur la mort !! Quant à tourner l’dos, à fuir comme un nid d’morbacs sur un imberbe, comptes pas d’ssus !! Les Loups mordent jusqu’au bout, pas d’chiots craintifs dans nos rangs. »


Puis, tandis que le tavernier s’éloignait avec sa choppe vide, il continua : « Au fait, qu’est c’tu fous dans l’coin ? »