Demandez la Gazette !

Quoi ? C'est ça ? Tu parles d'un boui-boui...
Eustasius aurait pu faire ça lui-même...
Glân Carch, tu restes dehors !

Deux coups à la porte. Un elfe tente de rentrer, un bandeau sur les yeux, une peau de lion sur les épaules. Son plissement de nez montre à ceux qui le regardent un léger désagrément de type olfactif.

Il déroule un parchemin pour le lire à voix haute, dans un enthousiasme proche du néant.

Oyez ! Oyez !
Sigmarites, force vive de l'Empire, oyez !

Je vous annonce qu'à compter d'aujourd'hui, les rédacteurs de la Gazette de Nuln sont à disposition de leurs compatriotes !

Chaque race a reçu un ou plusieurs correspondants afin de faciliter la communication et le recueil de données. Le pamphlétaire lisant cette annonce est ainsi officiellement votre intermédiaire avec notre organisation et reste donc a votre disposition pour...

Il marque un temps d'arrêt.

Enfin, là, c'est moi juste pour dépanner.
En principe, c'est un humain, comme Eustasius, qui devrait le faire. Bon, le temps qu'il organise tout, ça sera moi. Mais c'est temporaire.

Il range le parchemin et s'adresse à la foule ayant bien voulu l'écouter.
Et sinon, vous servez quoi ici ?

Par ce froid, une bonne rasade de bière derrière le gosier permettait aux mercenaires de faire évanouir dans l'alcool les rhumatismes de la journée.

..."Le boiteux" d'autant plus, avec ce moignon qui le lancinait, ravivant à chaque pas les douleurs d'un membre disparu.

"A s'donner pitié des eunuques...Doit pas être marrant tous les jours dans l'slibard pour eux!!" Pensa t'il en sirotant tranquillement une choppe.

Et voilà qu'un troubadour venait s'égosiller dans la taverne avec des "oyez et compagnie"

D'ailleurs, les rires hilares qui suivirent son laïus durent suffir au pamphlétaire pour se rendre compte que niveau Sigmarites et forces vives de l'Empire, les loups se posaient bon dernier, du moins si aucune solde ne suivait. C'est donc dans cette ambiance taquine que le sergent ne put s'empêcher d'extérioriser son dialecte si caractéristique:

"A notre disposition, tu dis? Comme une coureuse d'rempart quoi!! Sauf qu'elles, elles n'ont pas l'soldat dans l'calebute ni l'plume dans la main...L'inverse à la rigueur!! Tu parles d'un émissaire. Autant d'enthousiasme qu'une pucelle à sa nuit d'noce!! Les rires fusèrent, bien gras, le boiteux se vit même quitte d'une tape amicale dans le dos de la part d'un loup pendant qu'il poursuivit : "Allez, ma grande, joues pas la timide, va!! Du Sigmarite, y en n'a pas beaucoup dans l'coin, ils t'mettront pas l'feu aux miches ce soir. Enlèves moi donc c't baton qui bloque la voix et viens donc boire une mousse. J'ai gagné un bon pécule à Trois doigts, j'peux bien t'en payer une!!!!"

Je le savais...

L'elfe aveugle baissa la tête et soupira.
Il ouvrit la porte pour laisser entrer son lion et ils s'avancèrent et virent se poser à côté du Boiteux. Le lion aux pieds pour tenir chaud.

Eh bien, puisque c'est toi qui régale. On va faire comme le Rédac Chef a dit et on va rester 'diplomate'.

Il regarda la choppe de son voisin sans grande conviction. Il leva la main pour commander à boire, d'un ton monocorde.
Une bière qu'il a dit le jeune. Et pas celle que tu sers aux clochards.

Dwimbar s'approcha du comptoir et commanda une lampée Steiner (la pisse-roide locale). Il prit son bock, enleva quelques crasseries flottant dans la mousse et réfléchit au nom d'Eustasius. Il avait déjà vu ou entendu ce nom quelque part, sans doute sur un front de bataille, à moins que ce ne soit sur une liste de corps à enfouir dans un puits commun à la suite d'un carnage.
Le nain se racla la gorge puis interpella le gazetteux...

- "pamphlétaire ? recueillir des données ? fac'liter la communication ? va falloir causer comme un mercenaire, mon gaillard si tu veux t'faire comprendre. On est pas chez les diplomates d'Altdorf ici ou pire chez les frotte-parchemins de Marienburg. Tu veux quoi, trans'mettre des ordres ? brailler sur un héraut pour une mission ? reconnaître les lieux d'la bataille ? C'pas clair ton affaire...

Le nain marqua une pause en avalant d'une traite la fin de sa bière puis passa sa langue sur ses dents pour en nettoyer les dépots. Il mastiquait bruyamment et continua...

- "Et au fait, z'êtes tous accompagné d'un gros miaoul comme ça ? les gazetteux. Il doit vous revenir cher en bidoche, l'artiste, d'ailleurs, j'serai vous, j'garderai un oeil dessus, y a des souffreteux dans le coin qui r'chigeraient point sur du roti de lion braisé...

Oui, 'causer' comme un mercenaire, bien sur...
Mais ne comptez pas sur moi pour ça.

Si je suis la, c'est parce que la Gazette veux prendre contact avec les différentes organisations qui luttent contre la Destruction, et qu'elles que soient leurs motivations.

L'information permet de lutter contre le peur, et c'est bien la peur qui est l'ennemi du peuple. Alors même si je sais que tout ça vous passe au dessus, pensez ce qui peut arriver si la peur prend trop de place. Si Altdorf tombe. Si vous commanditaires se font tuer. Qui va vous payer ?

Arrêtez de jouer les durs derrière votre masque. Et songez un peu au monde qui vous entoure !

Il marque une pause et reprend plus bas.
Et puis ça ne vous déplairait pas de passer pour des héros... Ça vous ferait même de la publicité.

Puis il tourne la tête d'un air détaché.
Et si l'un d'entre vous préfère avoir un moignon a la place de sa main, qu'il s'approche de mon lion.

Dwimbar observa longuement l'elfe avec un sourire en coin.

- " Hmmm mouais, et t'as déjà essayé d'te battre avec un livre ou une poignées de parchemins toi ? à part s'ils sont bénis, j'suis pas sûr de l'efficacité... Ce qu'je veux t'dire, c'est qu'j'suis pas sur qu'en racontant l'horreur des charniers, la misère des faubourgs de Wolfenburg, les familles entières déshéritées qui parcourent les routes d'Ostland, tu enlève la peur dans l'ventre des gens de l'Empire. On est déjà pas nombreux à se battre sur les fronts, si en plus tu leur files les j"tons, ils vont rester dans les jupons de leurs mères....non ? enfin, j'dis ça, p'tet que j'ai mal compris ? ....

L'ingénieur commanda trois autres lampées et en poussa une vers le sergent et l'autre vers le pamphlétaire.

- "pour ta gouverne, la peur et l'horreur, ça nous passe pas au dessus, ça fait quatre cent ans que la Compagnie des Loups d'Ostland combat les ennemis de l'empire, c'est pas comme si c'était tous frais.... Les héros, les vrais, c'sont les soldats humbles qui se battent sur les fronts pour leur peuple et qui restent dans l'ombre. Eux ne sont pas tous les quat'matins à l'ouvrir en disant : j'ai fait ci, j'ai fait ça....c'est des héros d'salon ça, c'est bon pour le bâteau-théatre de Middenheim ou Li Cuneo rosso de Remas..."


Les traits du visage de Dwimbar se radoucirent et se décrispèrent, son regard aux reflets de brume se fit moins dur. Des souvenirs de sa campagne militaire en Tilée et du siège de Remas lui revenaient en mémoire. Bizarrement, la prise de la porte de Mongiatti et la destruction du clocher par l'ennemi ne lui effleurèrent même pas l'esprit....

-"Mais bon, j't'fais pas la leçon, j't'apprends rien, n'est ce pas ? si t'as réussi à survivre jusqu'ici, c'est sans doute qu't'as plus de ressources qu'on pense, même si j'ai des doutes. Si tu veux t'rendre utile et qu't'as pas peur d'te déplacer dans ces contrées dangereuses, y auras surement du travail pour des émissaires comme toi. Faudra sans doute que tu rencontres rapidement nos officiers et not'capitaine. Mais ça aussi, tu l'sais déjà et t'las peut-être déjà fait".

Le nain regarda en détail les armes de l'émissaire et s'attarda sur les reflets du métal et des alliages pour y déceler les éventuels défauts.

-"Et à part la plume et l'encrier, vous savez manier quoi au juste ?"

Vous savez, maitre nain, j'ai appris quelques petites choses sur la psychologie des humains, surtout sur celle de ceux qui sont loin de la ligne de front.

Et étonnamment, il vaut mieux annoncer que le front recule un peu, par voie de presse, que de les laisser l'apprendre par la rumeur, qui s'amplifie toujours trop.

Il se força a boire par politesse, en grimaçant a ses premières gorgées.
Même celle d'Harald est plus buvable.

Vous disiez donc ? Ah oui, mes armes...
Eh bien, la première est a mes pieds, dit-il en montrant son lion, et ma hache a deux mains est restée a la taverne de la rédaction. J'avais pas envie de me promener avec...

Puis il sortit de sa ceinture une simple hachette, elfique, de lancer et la pose devant le nain.
Donc mis a part cette hachette de lancer, j'ai rien sur moi.

Le Boiteux s'était contenté de boire sa mousse, l'écume blanchâtre s'accrochant à sa barbe, la chassant d'un revers de main tandis que de l'autre, il jouait aux dés, les lançant machinalement comme pour mettre au point une stratégie que seul lui comprenait.

La discussion entre l'elfe et "Trois Carré" lui taquinait l'oreille, un peu comme la langue d'une gueuse au réveil, peu d'intérêt une fois l'affaire conclue et limite agaçante.

Aussi, ne put il s'empêcher de s'en mêler.

"Un peu faible ta p'tite hache, mon gars, pour suivre les Loups sur les champs d'bataille. C'est comme soulever une grognasse avec une nouille molle dans l'calefouette, a part jouer du bec, tu f'ra rien d'autre!! Certains s'en contentent mais faudra pas geindre quand t'auras les lèvres en feu et un furoncle sur la langue!! Pis qu'je prenne pas ta bestiole à mordre un seul d'la meute ou j'm'en fais une pantoufle pour ma guibolle!!" Dit il à l'envoyé de la gazette sans cesser de le regarder.

Il laissa quelques secondes passer avant de reprendre : " C'serait peut être bien qu't'étales un peu c'que t'attend d'nous avant que l'capitaine s'radine. Qu'est c'tu dirais dans ta gazette si un contrat des Loups va à l'encontre de ta psychologie humaine?"

Edhiliôn regardait "Le Boiteux" d'un air surpris. Etait-il bête ou le faisait-il exprès ?
Tu penses vraiment que je me balade sur des champs de bataille avec uniquement une hachette ? Mince, je ne pensais trouver une once d'intelligence chez des mercenaires sauf sur les sujets militaires, mais si elle fait défaut même ici...
Quant au lion, évite les pantoufles si tu ne veux pas une bonne raison de boiter.

Sinon, concernant ton capitaine et ce que je suis sensé lui dire, ne t'inquiète pas pour moi. Et si tu veux un extrait de ce que ça peut être, une gazette, voilà notre premier jet d'article. Bon, ce n'est qu'un volant, mais la Gazette se voudra proche des combattants sur le terrain.
Il sort de sa poche un parchemin.



Il sourit au Boiteux.
Je te fais la lecture ?

« Je te fais la lecture ? »


Les quelques personnes alentours se rendirent compte à ces mots que l’atmosphère de la taverne risquait de tourner à l’orage. Jouer à ce jeu la avec le Lieutenant était suicidaire surtout avec quelques uns de ses fidèles non loin tels que « Ské » le Kislévite ou encore « La hyène », toujours à proximité de son supérieur. Même Dwinbar, le nain prénommé « Trois carré » depuis son intégration haussa un sourcil généreusement fourni devant la réplique cinglante du messager.


Le Boiteux, lui, posa sa bière et applaudit doucement « Clap, clap, clap » hochant la tête presque avec admiration.


« Bien….j’m’incline…J’m’incline….Tu s’ras un des rares à m’surprendre de la sorte. Tu vois, …. » Commença t’il posement « J’m’étais dit qu’avec l’physique ingrat que tu t’tapais, avec c’t allure a faire mourir d’rire un flagellant et ta bouille en forme de cul, t’allais nous sortir autre d’chose que d’la merdasse….Bah, non, t’es à l’image de ta gueule….Et ça, ça m’la coupe !! » Le boiteux se rapprocha un peu plus d’Edhilion, l’elfe pouvait maintenant sentir l’effluve de la bière fraichement ingurgitée. « D’une, faut être sacrement idiot pour chercher des noises à un loup dans sa propre tanière. Ta bestiole pourrait même pas bailler ou lâcher une caisse en s’cret qu’elle aurait déjà tellement d’lames autour des miches qu’elle s’en chierai d’ssus. De deux, M’ssieur le gazettier, tu d’vrais sortir un peu plus souvent. Tu crois quoi ? Que si y a baston, on t’attendra sans faire d’poussière que M’ssieur aille chercher son arme ? Si des non morts t’tombent sur l’palto, tu leur diras d’patienter?…Après tout, ils ont l’temps, hein, pas comme s’ils allaient mourir d’ennui !! Et pis, c’est vrai aussi, pas d’bandits, pas d’pequenots du Nord, non rien d’tout ça, t’es surement au courant toi, vu qu’t’apportes les nouvelles du front aux autres. «


Quelques sourires suivirent le laïus du Boiteux tandis qu’il continuait sur sa lancée, imperturbable : » « Ou alors t’es pas idiot mais t’as seulement une grande gueule !! Mais tu vois, l’artiste, des burnés, des gars croyant avoir dans l’falsard deux pasteques et finalement qui se baladent avec des raisins secs dans l’slibard, j’en connais un paquet, l’genre d’gars qui s’chient dans l’froc quand les choses s’gâtent. Et toi, tes balloches s’sont pas perdues dans l’desert de ton calefouette ? T’as tes poids chiches qui jouent des grelots quand tu marches, non ? Une façon d’attirer la foule pour vendre ta feuille de chou, certains l’font à la criée, non toi tu bouges du fion, ça fait titiller tes p’tits pois et l’tour et joué !!... »


Des rires commencèrent à fuser de droite à gauche.


« …Quant à ta feuille de chou, là, j’vais t’apprendre que non seulement j’sais lire mais j’sais compter aussi, un peu plus qu’ta frangine qui fait l’tapin au fond de je n’sais quelle bouiboui à arnaquer les gens et à s’faire mater l’front contre l’mur pour en avoir l’pieu trop près…Comme quoi connaitre l’front c’est peut être une affaire d’famille, hein. Alors maintenant, tu vas attendre sagement qu’l Capitaine s’radine ou j’t’enfonce si profondément ta plume dans l’fion que t’auras plus b’soin d’encre pendant un bout d’temps, tu piges ??!! «


/hrp Jolie gazette, bravo ^^

L'effet souhaité par la provocation sur leur illettrisme arrivait. Edhilion esquissa un grand sourire. Ça devenait enfin sérieux.
Eh bien voila ! Je savais bien que vous n'étiez pas des incultes, malgré les airs que vous vous donnez. C'était bien la peine de jouer les hommes élevés a la dure...

Et concernant ma défense, aux dernières nouvelles, Altdorf est sure. Et de plus, la taille importe peu. Enfin, est-ce mon avis. Après, je vous pensais capable de me croire sans que j'ai besoin de vous montrer tout le bastringue...

Bon, vu que vos rires stressent mon lion, je vais le ramener a la rédaction pour lui filer a manger. Et au passage, je vous prends ma hache...

Il finit sa bière et sort avec son lion, en laissant le parchemin sur le comptoir.

Puis il rouvre la porte en y passant la tête.
ET LA GAZETTE N'EST PAS A VENDRE !

/hrp PS : Merci. ^^